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Comment gagner plus à Matignon?
A l’assemblée nationale, les conseillers politiques ont été mis sous les projecteurs. Ils sont souvent ces « spin doctors » comme le peu recommandable Patrick Buisson sous la présidence de Sarkozy. Ils sont aussi les hauts fonctionnaires des cabinets ministériels.
"Par rapport au gouvernement Ayrault (2013), les rémunérations dans le gouvernement Valls (2014) sont en forte augmentation : +7,1%, à 8 201 euros pour la rémunération brute moyenne d'un agent, et +4,3%, à 2 235 euros pour les indemnités de sujétion [primes], note cet élu de l'Aisne. Il apparaît que c'est au secrétariat d'Etat à l'Enseignement supérieur que l'on est le mieux payé (12 222 euros par mois), soit deux fois plus qu'à la Francophonie, ministère qui paie le moins bien." C’est un député PS qui a soulevé les lièvres toujours tapis dans l’ombre de la république. Le député René Dosière a dénoncé, jeudi 30 octobre, sur son blog les rémunérations dans les cabinets ministériels du gouvernement Valls.
A Matignon, en un an, le nombre de membres du cabinet de Manuel Valls est passé de 67 à 55, ce qui a fait baissé le total des rémunérations (-1,3% par rapport à 2013), mais, si l’on paye moins de gens, ils sont plus payés avec un niveau élevé de 13.134 € mensuels. En outre les primes appelées "indemnités de sujétion particulières", sont passées à 6,1 millions d'euros, contre 5,85 millions en 2013 et autant en 2012. Le montant sous Fillon était de 6,5 millions pour 67 membres (12 de plus). Ainsi, alors que Manuel Valls présente un budget en diminution, les membres de cabinet sont mieux rémunérés qu’avant 2013. Par ailleurs, la majorité des Français subissent la crise, le chômage et la baisse de leur pouvoir d’achat.
Voilà comment Manuel Valls (rémunération mensuelle 14.910€) fait économiser 1 millions d’euros tout en augmentant les rémunérations de ses conseillers. Son slogan est donc de moins répartir le travail pour faire gagner plus à quelques uns, tout en réduisant le déficit. Si l’on étend cette logique de management à toute la société, il n’est pas étonnant que le chômage augmente. Si on l’étend à la répartition des richesses, on comprend pour qui Manuel Valls roule. Il fait des « plus » pour quelques uns avec des « moins » pour les autres.
Depuis 2012, les gouvernements socialistes ont serré la vis, réduit les dépenses, augmenté les impôts, taillé dans les aides sociales… et la rémunération des conseillers ministériels a augmenté en moyenne de 7, 1 % entre 2013 et 2014, alors que l'inflation, pour mémoire, est passée de 0, 6 % en septembre 2013 à 0, 3 % aujourd'hui. La rigueur n’est pas pour tout le monde. Des conseillers gagnent même plus que certains ministres dans 19 ministères sur 31. Au ministère de la culture, un conseiller gagne 13 744 euros par mois !... à l'Intérieur 12 987 euros, à la Décentralisation 12 680 euros, au commerce (12 369 euros) et enfin à l'Enseignement supérieur 12 222 euros. Ces petites entreprises d’Etat ne connaissent pas la crise. Le gouvernement n'est pas soumis à la règle qui prévaut à Matignon et à l'Elysée, selon laquelle un membre de cabinet ne peut pas gagner plus que son ministre de tutelle. "Si la règle s'appliquait, on réaliserait une économie de 3,8 millions d'euros, correspondant à 11 % des sommes versées", estime René Dosière. Actuellement les rémunérations d’un ministre ne devraient pas excéder 12.697,54 €. Ces rémunérations auraient bien été baissées malgré l’avis négatif donné par le Conseil, constitutionnel, sans que l’on sache exactement à partir de quand et dans quelles conditions. Il faut relever que souvent les ministres ont été des cumulards jusque dans le premier gouvernement Ayrault qui en comptait 25 sur 39 ministres. Vingt-cinq cumulaient salaires de ministre et d’élus locaux ! Et les quatorze vertueux qui restaient ne l’étaient souvent que par hasard : neuf d’entre eux n’avaient en effet pas d’autre mandat à leur nomination que celui de député, et un dixième (Fleur Pellegrin) n’avait pas de mandat du tout. En fait, seuls trois ministres (trois femmes d’ailleurs) avaient démissionné de toutes leurs fonctions locales : Cécile Duflot (conseil régional d’Ile-de-France), Dominique Bertinotti (mairie du 4e arrondissement de Paris) et Michèle Delaunay (conseil général de Gironde). Les cumulards ajoutent ainsi des rémunérations de l’ordre de 2.000 € à celles de ministre.
Notre actuelle jeune ministre de l’éducation nationale, avec son sourire permanent, est une cumularde jusqu’à février 2013, date à laquelle elle n’a gardé que son siège de conseillère générale à Lyon. Elle a connu son mari à l’ENA. Elle a échoué à cette école de technocrates mais son mari est de la même promotion qu’Emmanuel Macron. Boris Vallaud vient de passer du cabinet d’Arnaud Montebourg[1] au poste de secrétaire général adjoint élyséen en remplacement de Nicolas Revel, promis à d’autres fonctions. Voilà comment les énarques font carrière dans les coulisses de la république avec des salaires parfois supérieurs aux ministres. Ils deviennent ensuite ministres comme Emmanuel Macron ou Fleur Pellerin pour en citer deux dans l’actualité politique. Parfois la carrière politique se construit en couple comme Naja Vallaud-Belkacem et son mari, ou comme Ségolène Royal et François Hollande.
En dehors des rémunérations et de défraiements, du Président jusqu’aux ministres, tous bénéficient d’avantages (transports gratuits en 1er classe SNCF et en avion, logement, voitures avec chauffeurs… etc). Ils n’ont pas oublié de se garantir des retraites avantageuses. Inutile de revenir aussi sur les privilèges et les retraites de nos élus nationaux et européens qui votent la rigueur sans se l’appliquer à eux-mêmes. Et le train de vie assuré à nos anciens présidents toujours vivants. Et les membres du conseil constitutionnel (anciens présidents compris)... Et les grands patrons avec leurs hautes rémunérations et leurs retraites chapeaux… et les gros actionnaires, les fonds de placement… etc. Aucun ne renonce à une once de privilège. Aucun n’accepte le gel de leurs revenus, la remise en question de leurs retraites. On va s’arrêter là pour aujourd’hui et éviter de se faire monter la tension.
Il fait beau. Le soleil est généreux même pour ceux qui ne s’enrichissent pas dans l’ombre de la république. Bon week-end !
Fucone
[1] Vous voulez des nouvelles d’Arnaud Montebourg ? Il a demandé une bourse pour faire une formation en économie et du business. Lorsque l’on pense qu’il a été ministre de l’économie et du redressement productif, on comprend que des ministres soient moins payés que les membres de leurs conseillers. En plus, il a sollicité une bourse ! Pour l’obtenir, compte-t-il sur son air de fils à papa, étudiant attardé ? A moins que ce ne soit sur ses appuis politiques ? Qu’en penseront les chômeurs qui pointent à l’ANPE sans rien obtenir ?
Tags : Valls, Matignon, conseillers, rémunérations, Dosière, Vallaud, Montebourg
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Commentaires
1Manca alternativaSamedi 1er Novembre 2014 à 12:35Imaginez ce que serait le monde sans «les jobs à la con», comme conseiller politique, des directeurs généraux d’entreprises, lobbyistes, assistants en relation presse, télémarketeurs… Que serait le monde sans les énarques et les avocats d’affaires ? On peut penser que tout s’améliorerait grandement. Par contre les conséquences seraient immédiates et catastrophiques si disparaissaient les médecins, les infirmières, les éboueurs, les mécaniciens… tous ceux qui participent concrètement aux besoins de la société. « Un monde sans profs, sans dockers serait bien vite en difficulté, et même un monde sans auteur de science-fiction ou musicien de ska serait clairement un monde moins intéressant » ajoute l’anthropologue David Graeber dans un livre sur les « bullshit jobs ». Imaginez ce que serait la vie politique sans les chefs de cabinet, les « spin doctors » et autres éminences grises de la république. On peut penser qu’elle évoluerait et s’améliorerait grandement.Répondre
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