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Les bons comptes font les bons amis...
La Cour des comptes vient s’immiscer dans la politique budgétaire de la France. Elle n’a pas fait une révélation fracassante en annonçant que la France ne devrait pas réussir à réduire son déficit public à 3% du PIB en 2013. Certes il est prévisible que la croissance pourrait ne pas dépasser les 0,3%. Toutefois le premier président de cette haute instance ne s’est pas contenté de dresser un tableau pessimiste puisque, il a enfoncé le clou sur la nécessité de réduire encore les dépenses publiques pour ne pas augmenter davantage les impôts.
Drôle de république ! La cour des comptes donne des directives budgétaires au gouvernement et le conseil constitutionnel retoque les lois votées par le parlement et le sénat. D’ailleurs l’UMP a déjà annoncé que pour celle sur le mariage pour tous, il y aurait un recours devant le conseil constitutionnel si la loi passe. Hollande et Ayrault peuvent décliner toute responsabilité sur la politique de droite qu’ils mènent.
Le gouvernement s'est engagé à ramener le déficit public à 4,5 % du produit intérieur brut (PIB) en 2012 et à 3 % en 2013. Le rapport de la Cour des comptes ne remet pas en cause les objectifs mais les moyens mis en œuvre pour atteindre celui de 2013. Ses prescriptions entrent dans le discours droitier qui préfère réduire de façon drastique les dépenses publiques plutôt que de faire davantage contribuer les riches à l’effort fiscal. Elles entrent aussi dans le droit fil de la politique européenne qui a fixé des objectifs d’austérité. Pourtant, même à droite des voix discordantes se sont fait entendre sur l’objectif des 3% et notamment au FMI celle de Christine Lagarde. La directrice du Fonds monétaire international a estimé que l'objectif de ramener le déficit de la France à 3 % du PIB en 2013 était "extraordinairement ambitieux" et qu’il fallait "prendre un peu plus de temps" et elle a ajouté :"Il faut que le chemin soit parcouru ensemble par les Européens. Il ne faut pas que la France toute seule, l'Espagne toute seule, la Grèce toute seule disent : c'est trop dur pour moi, je vais le faire plus lentement"… "C'est mieux de le faire collectivement, de prendre un peu plus de temps plutôt que d'avancer à marche forcée", a-t-elle insisté, en rappelant que l'Espagne est allée trop vite dans la rigueur. Elle a même reconnu que "l'effet des plans d'austérité sur la croissance est plus fort que ce que nous avions anticipé il y a 3-4 ans". C'était une "erreur d'anticipation ». Bien sûr elle reste adepte de l’austérité mais avec des objectifs de déficit revus à la hausse pour ne pas freiner la croissance. (Dans l’actualité de l'ex-ministre de Sarkozy, une audition serait prévue prochainement par la Cour de justice de la République (CJR) dans le cadre de l’instruction qui la vise de "complicité de faux" et "complicité de détournement de fonds publics". Il s’agit du dédommagement de Bernard Tapie dans son conflit avec le Crédit Lyonnais).
Le premier président de la Cour des comptes est un ancien élu socialiste qui a obtenu ce poste en 2010 par la volonté de Nicolas Sarkozy. L’express titre « Didier Migaud agace ses anciens camarades socialistes » et rapporte quelques réflexions relevées au sein du PS. Tout cela n’est qu’un jeu médiatique pour faire avaler les couleuvres au peuple de gauche. En fait le rapport de la Cour des comptes arrange tous les libéraux y compris Hollande et Ayrault. Ils ont fixé un objectif qui aggrave l’austérité pour pouvoir ensuite desserrer l’étau sur les dépenses publiques en révisant le déficit à la hausse. L’objectif réel n’est pas le déficit à 3% mais l’acceptation d’une austérité qui va s’installer dans la durée.
Hollande et Ayrault devraient savoir qu’il est difficile de soigner efficacement un malade afin d'éviter de le rendre encore plus malade qu'il ne l'est déjà. Les remèdes de chevaux sont bons pour les chevaux, les cures d'austérités en Grèce, Espagne ont rendu les pays encore plus malades, désespérés, sans espoir de guérison à court terme. Voulez vous cela pour la France quand la majorité des plus riches ne veulent pas participer plus alors qu'ils ont profité amplement du pays et de ces avantages ? Seule L'Allemagne tire profit d'une Europe malade et d’un euro trop fort. Avec les libéraux, elle entraîne toute l’Europe dans la récession.
Dans le rapport de la Cour des comptes, on trouve une anecdote intéressante. La Cour critique également l'insistance avec laquelle l'État a contraint entre 2004 et 2009 la Monnaie de Paris à céder une parcelle de terrain à l'Institut de France qui voulait y construire un auditorium. Sur la base de ce rapport, le quotidien Le Monde a établi un rapprochement entre les actions de Nicolas Sarkozy, lors de son passage au ministère des Finances, et d'Éric Woerth, ancien ministre du Budget, et la volonté que soit construit cet auditorium qui devait porter le nom d'André Bettencourt, défunt époux de la milliardaire Liliane Bettencourt, pour laquelle a un temps travaillé indirectement la femme d'Éric Woerth. Cela devrait avoir attiré l’attention d’un juge bordelais.
Battone
Tags : Cour, Comptes, budget, Europe, Hollande, Lagarde, Ayrault, déficit, croissance
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