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Quel scénario pour la SNCM?
Après la plainte de la compagnie italo-suisse Corsica Ferries, la Commission Européenne a d’abord exigé que la compagnie rembourse à l’Etat français 220 millions d’euros d’aides publiques versées à la compagnie de 2007 à 2013… C’était la première décision pour acculer la compagnie française à la faillite. La commission en a rajouté une seconde couche, histoire d’assurer l’estocade, en remettant en cause, pour un montant équivalent, des aides touchées de 2002 à 2006, alors qu’elle avait donné son accord à cette subvention en 2008, accord annulé en septembre 2012, sur plainte, une nouvelle fois, de Corsica Ferries. La SNCM se voit demander 440 millions, soit un an et demi de chiffre d’affaire. La CGT des marins de la SNCM ont répliqué en affirmant que « Corsica Ferries, en dévoyant le système de l’aide sociale aux passagers, a touché illégalement 180 millions d’aides depuis 2002 » et demande que ce concurrent justifie le versement de ces aides !
Il faut rappeler ce que la CGT des marins de la SNCM dénonce depuis longtemps au sujet de la Corsica. Alors que la SNCM, société française naviguant sous pavillon français, n’emploie que des nationaux, aux salaires et conditions sociales de notre pays, la Corsica Ferries, filiale d’une holding immatriculée en Suisse, après l’avoir été au Luxembourg, navigue sous pavillon italien. Cela lui permet pratiquer un dumping social agressif, en employant notamment de nombreux marins roumains. Le SMIC roumain dépasse à peine 10% du SMIC français.
Aujourd’hui les syndicats de la SNCM ont demandé à être reçus par Arnauld Montebourg en déplacement à Marseille. Le Ministre du commerce et du redressement productif devrait les recevoir sans enthousiasme, dit-on. De nombreuses questions se posent et en premier lieu qu’en est-il des promesses du gouvernement et de son ministre des transports ? Nous pensons au plan de redressement accepté par les syndicats de la SNCM malgré un plan social, à l’achat de nouveaux bateaux construits à St Nazaire, au décret anti-dumping annoncé… Ce décret devait contraindre Corsica ferries à battre pavillon français et donc à respecter la législation française en matière salariale et de conditions de travail. Cette mesure valable pour la SNCM aurait protégé, si elle était étendue, l’acier, les pneus, le transport routier… autant d’emplois perdus à cause des délocalisations et du dumping social.
Nous ne nous faisons pas grande illusion sur l’intervention de Montebourg dans le dossier SNCM. Nous aimerions nous tromper mais le scénario d’un démantèlement semble plausible si on se reporte au dossier établi par le journaliste indépendant Alain Verdi et aux derniers rebondissements dans lesquels apparaît un repreneur trouvé par Transdev/Véolia, un Monsieur Daniel Berrebi représentant une société Baja Ferries dont le siège social est à Miami (USA) et le siège commercial à La Paz (Mexique). Il s’agit d’une filiale d’une société-mère Unishiping. Cet homme d’affaires « providentiel pour Transdev/Véolia » ne veut pas des nouveaux bateaux. Dans une interview donnée samedi dernier au journal « La Provence », il se présente et expose son projet qui repose sur la flotte existante de la SNCM avec l’intention de développer le trafic vers le Maghreb. Il compte sur une transaction de l’Etat français avec la commission européenne pour trouver un compromis financier sur les 440 millions. Il en profite pour mettre en garde les syndicats en faisant savoir qu’une grève provoquerait la fin de son offre de reprise et que, dans le cadre de cette reprises, « Le personnel de la SNCM devra faire un effort », sans détailler l’ampleur de l’effort, c'est-à-dire le nombre d'emplois supprimés. Il aurait promis à l’Etat français que la compagnie resterait sou pavillon français, une précision pour laquelle nous sommes dubitatifs et qui en dit long dans la connaissance que le gouvernement a de cette offre. Montebourg va-t-il défendre le « patriotisme économique » ?
Cette offre de reprise qui semble téléguidée par Transdev Véolia, partisan d’un dépôt de bilan, semble destinée à faire porter la responsabilité de la déconfiture aux syndicats de la SNCM et en premier lieu à la CGT.
Dans le dossier SNCM, tout le monde veut faire oublier le scandale de sa privatisation initiée par Dominique de Villepin et l’acharnement de la commission européenne qui, à chaque tentative de plan de redressement, a asséné de nouveaux coups de boutoirs. Le gouvernement et François Hollande semblent avoir d’abord pris le parti de faire traîner les choses pour cause d’échéances électorales mais son attitude démissionnaire est apparue au grand jour lorsque ses représentants au conseil d’administration de la SNCM ont laissé la main à Transdev, donc à Véolia alors même que l’Etat y est associé à 50% avec Veolia. L’Etat se comporte comme un actionnaire minoritaire dans la SNCM alors qu’il en est le premier financier.
Manca alternativa, qui a toujours soutenu les personnels de la SNCM corses et continentaux, insulaires et de la diaspora, suit ce gâchis dont les responsables sont L’Etat (depuis de Villepin et Chirac jusqu’à nos jours), la commission européenne, Véolia et d’autres… Nous vous tiendrons informés.
Matelone.
Tags : SNCM, Berrebi, Baja, Ferries, Montebourg, grève, commision, européenne, France, Corse
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Commentaires
1Manca alternativaLundi 2 Juin 2014 à 17:03Cet après-midi, avant de rencontrer en Préfecture des employés de la SNCM, aussi inquiets qu'en colère. Montebourg a glissé: "Ce dossier est celui du ministère des Transports...Je vais les rencontrer, je fais ce que je peux." Une délégation de marins et personnels de la SNCM a donc été reçue par le ministre de l’économie et du redressement productif en compagnie de son cabinet, cet après-midi à Marseille en préfecture. « Aucune mesure n'en est ressortie » a regretté, à la ,sortie, Frédéric Alpozzo, au nom de la CGT. On s’en était douté devant le manque d’enthousiasme de notre patriote économique !Répondre
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